REPUBLIQUE DE DJIBOUTI

PÔLE UNIVERSITAIRE DE DJIBOUTI

 

  Établissement d'Enseignement Supérieur

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INSTITUT SUPERIEUR DES AFFAIRES DE DJIBOUTI

 Collection "Études de métiers"

 Couture

- SOMMAIRE -

I. DEFINITION DE LA PROFESSION ................................................

A) Activités

B) Aptitudes

II. LE MARCHE ..................................................................................

A) La demande

1. Tendance de la consommation

2. Typologies de la clientèle

3. Variations saisonnières

B) L'offre

1. Classification des tailleurs

2. Les principales entreprises

3. La concurrence

4. Différenciation et marchés ciblés

5. Les prix

III. LES MOYENS DE PRODUCTION ................................................

A) Les ressources humaines

B) Les équipements

C) Matières premières, fournisseurs

IV. EXPLOITATION ...........................................................................

A) Chiffre d'affaires

B) Charges

V. REGLEMENTATION .....................................................................

VI. LE MILIEU PROFESSIONNEL .....................................................

A) Organismes professionnels

B) Formation

C) Bibliographie

CONCLUSION ..................................................................................

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I. DEFINITION DE LA PROFESSION

A) Activités

L'activité consiste en la fabrication de tous types de vêtements, exécutés sur mesure et nécessitant en général des essayages. Il s'agit donc le plus souvent d'un travail à façon (par opposition au prêt à porter) avec tissu fourni et modèle choisi par le client.

 

On distingue à part les activités de conception exercées par les stylistes et les modélistes, tournées vers la haute couture ou l'industrie et qui n'existent pas actuellement à Djibouti.

 

Notons ce bizarre sexisme du langage, puisque le mot "couturière" ne connaît pas de masculin (sauf s'il s'agit d'"un grand couturier") et que le mot "tailleur" ne connaît pas de féminin. On aura compris que le tailleur exécute un travail plus noble, plus proche de l'artisanat d'art et plus qualifié (les costumes) que la couturière vouée à la "couture floue" (robe, jupe, chemisier...).

 

On distingue encore l'activité de retouche : ourlets, boutons, fermetures, mises à la taille..., qui constitue aussi l'après-vente du tailleur.

 

En définitive, à Djibouti, le tailleur est un artisan généraliste, cumulant toutes les fonctions décrites ci-dessus : conception, fabrication, réparations.

 

B) Aptitudes

- Avoir le goût de l'harmonie des formes et des couleurs, et un bon sens créatif, de la dextérité manuelle et une bonne vue, être rapide d'exécution, telles sont les qualités requises du tailleur. Il s'agit de maîtriser la totalité du métier de la conception jusqu'à l'exécution et d'assurer de surcroît la gestion complète de l'affaire.

 

- L'accueil de la clientèle, et la qualité de la relation qu'il faudra créer et entretenir tout au long du travail (choix du tissu, du modèle, essayages...) sont déterminants dans ce métier. Agir avec doigté et discrétion. Les réactions de la clientèle constituent l'élément majeur d'appréciation du travail. Le bon tailleur, comme le médecin,  écoute  et connaît sa cliente et sait la conseiller.

 

- La disponibilité : les dépassements d'horaire sont fréquents.

 

II. LE MARCHE

A) La demande

Pour des raisons culturelles, ce sont évidemment les femmes qui sont les principales consommatrices et acheteuses des services du tailleur. Sans doute davantage préoccupées de leur apparence et de leur beauté, mais aussi de leur statut professionnel, elles ont de plus la responsabilité du budget "habillement" de la famille, autant pour elles-mêmes que pour leur mari et les enfants.

 

1. Tendance de la consommation

Malgré la concurrence du prêt-à-porter, l'activité de tailleur se maintient. Et ce, pour deux séries de raisons, l'une liée à la tradition et l'autre à la rationalité économique du consommateur :

 

·      Il est d'usage populaire d'aller chez le tailleur et de porter des vêtements sur mesure. Les clients sont fidèles à leur tailleur, avec qui ils ont plus qu'une simple relation commerciale. A l'opposé, le prêt à porter est récent et par nature impersonnel.

 

·      Le prêt à porter propose des marchandises importées, dans une gamme assez restreinte de taille, dans un style surtout occidental ne correspondant pas à la religion et à des prix généralement plutôt élevés. Autrement dit, le sur mesure est compétitif du point de vue rapport qualité/prix. Cette situation est inverse de celle prévalant en Europe, par exemple, où la confection sur mesure est plutôt haut de gamme et plus chère que le prêt à porter.

 

2. Typologies de la clientèle

A Djibouti, la clientèle étant variée de par son origine (djiboutienne, mais aussi somalienne, éthiopienne, yéménite, française), son style et ses goûts sont donc très différents.

 

Voici plusieurs classifications possibles de la clientèle de ce secteur :

 

·      Clientèle "traditionnelle" et clientèle "moderne"

La clientèle féminine traditionnelle porte ses choix sur les jupes longues, les chemises à manches longues, les voiles... Il existe deux types de voiles : le voile très large qui cache tout le corps et le voile jusqu'aux genoux. Dans cette catégorie, on peut citer aussi la clientèle non négligeable des hommes avec les kamiss et autres vêtements traditionnels des nomades, vêtements qui ne peuvent provenir que d'une production locale.

 

Qui dit moderne, dit mode et donc changement. Le tailleur doit savoir répondre en temps utiles aux nouveaux courants de la mode qui touchent surtout les jeunes filles : jupes portefeuilles, jupes serrées et courtes, jupes longues et droites, jupes moulantes... Vecteur principal de la mode : la télévision ; paraboles et bouquets de chaînes influencent surtout les jeunes, à travers des émissions spécifiques ou simplement par les acteurs et chanteurs préférés.

 

·      Clientèle "locale" et clientèle "étrangère"

Les Européens constituent une clientèle à part. Leur demande est importante et variée. Pour les femmes de militaires qui font un séjour relativement court à Djibouti, on pourrait presque parler d'exportation, puisqu'elles profitent des prix intéressants des tailleurs pour faire réaliser des vêtements dans des tissus chauds qu'elles porteront en France. Il s'agit souvent de copier des modèles ou bien de travailler d'après des catalogues de vente par correspondance (la Redoute...) ou des magazines féminins (Elle, Marie-Claire...).

 

·      Les entreprises et l'Etat

L'Etat est un client de taille lorsqu'il commande des uniformes pour les militaires, ou quand les sociétés publiques équipent leur personnel de vêtements professionnels. Les entreprises privées ont également des besoins en bleus de travail.

 

3. Variations saisonnières

Au moment du Ramadan, de l'Aïd et de la rentrée scolaire, les carnets de comman-de sont pleins et les tailleurs travaillent nuit et jour. On peut citer aussi la période de Carnaval, où les enfants des Européens se déguisent, avec l'aide d'un tailleur.

 

B) L'offre

1. Classification des tailleurs

 

On distingue trois catégories ou modes d'exercice de la profession de tailleur :

 

·      Tailleur à domicile

C'est le plus discret, sa clientèle est une clientèle de proximité immédiate. On lui confie des travaux plutôt simples, robes et boubous. Il économise des frais de gestion (loyer, électricité...), mais est condamné à rester de taille modeste du fait de sa discrétion. Il s'agit en majorité de femmes (veuves par exemple), qui cherchent un revenu de subsistance.

Cependant, il faut signaler des cas rares mais significatifs de succès dans cette formule d'installation à domicile :

- la réputation d'une couturière pour son savoir-faire, réputation qui dépasse largement les limites de son quartier (Ambouli), puisqu'elle reçoit des commandes de clientes à l'étranger ;

- la spécialisation d'une femme (rue de Moscou) en broderie traditionnelle : elle décore de soie verte les verres et assiettes pour les cérémonies de mariage, ou le lit des femmes qui viennent d'avoir un enfant, le tout dans le respect des coutumes djiboutiennes ;

- la production sur stock et non à la commande de "shitt" (en somali), sorte de boubou en coton, très demandé en saison chaude et porté à la maison. Beaucoup de couturières le réalisent à un prix (1000 DJF) inférieur à celui des boubous en vente dans la rue des Mouches. De nouveaux modèles de tissus (dessin, couleurs) arrivent chaque semaine et renouvellent la mode.

Dans le même ordre d'idée, certains tailleurs fabriquent les vêtements traditionnels des hommes nomades, vêtements qui sont vendus dans des boutiques spécialisées des quartiers (Arhiba, Balbala notamment).

·      Tailleur "de rue"

Comme le tailleur à domicile, il limite ses charges, sa machine à coudre est même mécanique. Déconsidéré, il s'occupe des basses "besognes" : boubous, robes simples, retouches... pour des prix très bas.

A 80 %, ce sont des hommes et ils sont concentrés dans la rue des Mouches, mais on les trouve un peu partout dans les quartiers, souvent installés bien en vue près d'une boutique très fréquentée ou au bord d'une route passante avec un accès facile pour des clients en voiture.

De nombreux tailleurs de rue, quand ils sont en sous-activité, produisent des vêtements bas de gamme, qui sont revendus par des colporteurs dans les quartiers. D'autres fabriquent des sacs en plastique ou en jute, à partir de matériaux de récupération.

 

·      Tailleur "installé"

On peut parler d'entreprises du secteur formel pour ces tailleurs, installés principalement le long des Caisses (rue de Brazzaville ou Bacoté), mais aussi au quartier 1 et au quartier 6. Dans les zones où ils ne sont pas implantés, comme Engueila ou Gebal, par exemple, ils sont remplacés par les tailleurs à domicile qui sont leurs concurrents directs. Ces tailleurs louent en général un local où ils emploient en moyenne deux ou trois employés. Seul le tailleur Mahad se distingue par sa taille et l'importance de sa clientèle.

Le tailleur installé est visible et paye donc sa patente. De ce point de vue fiscal, on peut parler de concurrence déloyale des autres formes d'exercice : tailleurs à domicile et tailleurs de rue, qui ne payent pas d'impôts.

 

2. Les principales entreprises

On dénombre une cinquantaine de tailleurs installés. En voici la liste (page ci-après) avec leur localisation et leur nationalité. Il faut noter la faible proportion de Djiboutiens (environ 40 %) dans ce métier. Remarquons également l'absence de femmes dirigeant ces petites entreprises formelles, alors qu'elles savent gérer leur affaire "à domicile". Une division du travail "culturelle"?

 

3. La concurrence

Le métier de tailleur est soumis à la concurrence des autres circuits d'acquisition de vêtements :

·      Le prêt à porter dont on a parlé plus haut, vendu en boutiques, est plus proche de la mode, des nouvelles tendances. Les vendeurs savent s'approvisionner chez les fournisseurs bon marché d'Asie du Sud-Est.

 

·      Les Charcharis sont des femmes commerçantes. Elles importent également du prêt à porter, mais davantage haut de gamme et donc plutôt cher. Cependant, elles accordent des facilités de paiement (1 à 2 mois de crédit). Toutes les marchandises proviennent de Dubaï et sont donc de style arabe traditionnel.

 

·       Le "houdeh" ( who died ) est la fripe, le vêtement d'occasion qui arrive par containers entiers en provenance d'Europe et des Etats-Unis. Relavés sur place, les vêtements sont vendus vers la rue des Mouches. Vêtements de tous âges, de médiocre qualité, ils ont le grand avantage d'être bon marché. Ces habits sont souvent démodés, mais de plus en plus, les revendeurs font remonter l'information sur les goûts de la clientèle vers les commerçants-importateurs de houdeh pour qu'ils soient plus sélectifs.


- LISTE DES TAILLEURS INSTALLES -

 

QUARTIER

TAILLEUR

ADRESSE

NATIONALITE

 

 

 

 

 

 

Centre-ville

Mahad

Houssein

Ahmed Nour

Gamal

Ibrahim Bacouche

Baraka

Kamal

Tailleur de l'An 2000

Liban chez Saad

Etoile couture moderne

Tailleur moderne de la Mar rouge

Tailleur de la paix

Mohamed Kayed

Couture plus

iitol ("couds moi")

Atlas

rue d'Athènes

rue de Moscou

rue d'Athènes

rue Soleillet

rue de Londres

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue de Brazzaville

rue d'Athènes

rue d'Athènes

rue Cheik Moussa

rue de Londres

djiboutienne

pakistanaise

djiboutienne

éthiopienne

éthiopienne

éthiopienne

éthiopienne

éthiopienne

djiboutienne

sénégalaise

djiboutienne

éthiopienne

djiboutienne

djiboutienne

djiboutienne

djiboutienne

 

 

 

 

 

Quartier 1

Liban

Happy Arta

Iftin

de l'Europe

Hilaos

Le Paris

Dubaï

Otmani

Abdou

Abdourahman

Mohamed

Sur mesure

Al Darwich

Central chez Rachid

Mer rouge

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

rue de Khât

parallèle rue de khât

parallèle rue de khât

à coté de Mokbaza central

à coté de Mokbaza central

djiboutienne

djiboutienne

djiboutienne

somalienne

éthiopienne

djiboutienne

yéménite

yéménite

éthiopienne

éthiopienne

yéménite

yéménite

djiboutienne

éthiopienne

djiboutienne

Quartier 2

Moussa

2 anomymes

près hôtel Randa

avenue 9

somalienne

djiboutienne

Quartier 4

D.H.D.

route d'Arta

djiboutienne

 

 

 

 

Quartier 6/7

Daala

Djubba

Caaray

Al Fatax

Juba

Rapide

Suffi 99

Alla Amin tailor

Al Baraka

Kaajay

Deux mille deux

Tawakal

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

avenue Nasser

somalienne

somalienne

djiboutienne

éthiopienne

somalienne

djiboutienne

somalienne

djiboutienne

somalienne

somalienne

éthiopienne

somalienne

Arhiba

H.K.O.

mosquée Dar es Salam

djiboutienne

Ambouli

du 8 Mai

Ambouli

djiboutienne

 

Balbala

Masha Allah tailor

Tailleur

Tailleur

Cheik Osman

rue Danesteh

près des pompiers

rue Danesteh

Près école Balabal 1

djiboutienne

somalienne

somalienne

somalienne

 

4. Différenciation et marchés ciblés

Spécialités : En marge de leur ouvrage principal, la plupart des tailleurs font preuve de créativité et ont leur propre spécialité. Chacun utilise sa technique et ses chutes de tissu pour fabriquer des produits supplémentaires.

Par exemple :

- le tailleur Mahad coud des nounours, des sacs à dos et des trousses ;

- le tailleur Gamal confectionne des vêtements de sport et des robes de mariées ;

- d'autres comme le tailleur pakistanais et le tailleur Mahad font des draps, des housses de sièges de voiture, des housses de canapé... ;

- certains s'occupent principalement des salons, un travail qui se situe entre couture et tapisserie. Ce créneau est particulièrement lucratif après chaque inondation !

 

Clientèle privée étrangère : Le tailleur Mahad a su capter la clientèle étrangère qui constitue 80% de sa clientèle totale. Professionnalisme, qualité, service après-vente gratuit, bonne organisation et respect des délais, prix fixes rassurant une clientèle peu habituée à marchander... telle est la recette du succès de ce tailleur dont la réputation se transmet dans les milieux européens.

 

Clientèle d'entreprise : Certains tailleurs, comme le tailleur Ibrahim Bacouche, le tailleur de l'Europe et le tailleur Mohamed avaient passé des contrats avec l'Etat pour des uniformes de l'Armée. Cependant, ils se plaignent de retards de paiement importants (plus de deux ans).

"Couture plus" a passé contrat avec l'EDD et le Port, cet atelier produit ainsi près de 500 uniformes chaque année. Enfin, le tailleur Mahad a des liens avec des entreprises privées (Shell, MTS), des entreprises publiques (l'Aéroport) et des organismes internationaux (Ambassade de France).

 

4. Les prix

Si les prix sont quelque peu négociables (surtout si on est un client fidèle) et varient selon les modèles, on observe des tarifs ou fourchettes de prix stables (voir tableau page suivante).

Notons que les retouches "après-vente" sont souvent gratuites.

 


- PRIX MOYENS DES DIFFERENTS PRODUITS -

 

TYPE

ARTICLES

PRIX  DJF

 

 

 

 

 

Vêtements modernes

 

 

- robe

- jupe

- jupe-culotte

- chemise

- pantalon

- short

- gilet

- débardeur

- survêtement

- veste avec doublure

- veste sans doublure

- ensemble  (chemise et pantalon)

- veste pour femme

 

 

3 000 - 4 000

1 500 - 2 500

1 500 - 2 000

1 500 - 2 500

1 500 - 3 000

1 500 - 2 000

1 000 - 1500

1 000

1 500 - 2 000

10 000

2 500 - 5 000

4 000 - 8 000

5 000 - 10 000

 

 

 

Vêtements traditionnels

 

 

- boubous

- châle

- habits traditionnels

- galabiya

- kamiss

- jalabib

- robe longue

- robe de mariée

 

 

100 - 500

50

2 000 -  3 000

2 500 - 3 000

2 500

300 - 500

1 000 - 2 500

3 000 - 20 000

 

 

 

 

 

Maison

 

- coussins

- housse de coussin

- housse de fauteuil

- rideau simple

- rideau double

- tapisserie de salon saoudien

- draps simples

- draps décorés (broderies)

- broderies (verre, pannier, plateau...)

- moustiquaires

 

 

500

500

10 000

500 - 1 000

3 000 - 4 000

180 000 - 200 000

1 500

2 000

1 000 - 2 000

1 500

 

 

Divers

 

- trousse

- sac à dos

- nounours

- housses de voiture

 

 

800 - 1 000

2 500 - 3 500

1 500 - 3 500

5 000 - 10 000

 

 

III. LES MOYENS DE PRODUCTION

A) Les ressources humaines

Organisation : L'activité est artisanale, dirigée par le maître tailleur. Les employés sont derrière leur machine à coudre, exécutant un travail complet et assumant la responsabilité totale de la pièce à réaliser. Les ateliers sont trop petits pour qu'il y ait une spécialisation du travail, sauf chez le tailleur Mahad.

 

Rémunération : Les salaires sont modestes, variant entre 20 000 et 30 000 DJF par mois. Certains tailleurs préfèrent rémunérer leurs employés au rendement : 200 à 400 DJF la pièce en général, ou le tiers du prix de vente.

Seul le tailleur Ahmed Nour (quartier 2) utilise le système de l'apprentissage. Les apprentis sont placés par relations pour apprendre le métier.

 

B) Les équipements

Un exemple d'équipement standard complet est composé de :

- une piqueuse point noué

- une surjeteuse 4/5 fils

- un poste de repassage, vapeur demi-professionnel

- 3 mannequins de bois de tailles différentes

- table de coupe 0,80 x 1,20

- un miroir

- meubles divers, cabine d'essayage

- petit matériel, ciseaux et accessoires

soit théoriquement , au  prix du neuf, un montant de plus d'un million et demi DJF.

 

Machines : Dans la pratique, on peut démarrer avec un équipement plus restreint. Les machines utilisées couramment coûtent de 45 000 DJF à 300 000 DJF pièce. Certains tailleurs possèdent des machines à broder et des machines à boutonnières. On trouve assez facilement des pièces de rechange dans les quincailleries de la place, sauf pour les machines à broder.

 

Electricité : Les coupures d'électricité imposent deux types de solutions : l'achat d'un groupe électrogène ou bien le retour aux machines à pédales (ou les deux). Les tailleurs possèdent aussi des fers à repasser électriques.

 

Les locaux des tailleurs sont parfois très petits (5 m2) et comportent rarement une véritable cabine d'essayage, qui est donc censé être effectué chez soi..

 

C) Matières premières, fournisseurs

Les tissus ramenés par les clients sont pratiquement tous achetés à Djibouti-ville, dans les boutiques de la rue des Mouches. Quelques uns ramènent leurs tissus de Dubaï ou d'Arabie Saoudite et ne les présentent qu'aux tailleurs de confiance.

 

Les fournitures : fils, épingles, boutons, fermetures... sont achetés sur place. Seul, le tailleur Mahad importe lui-même certaines fournitures de mercerie de Dubaï ,du Yémen, d'Arabie saoudite, de France (fil élastique, fermetures invisibles).

 

IV. EXPLOITATION

A) Chiffre d'affaires

D'après l'enquête menée auprès des tailleurs, ceux-ci déclarent avoir un chiffre d'affaires compris dans une fourchette de 300 à 400 000 DJF par mois.

 

B) Charges

Voici les charges des ateliers enquêtés :

 

Nature (mensuelle)

Fourchette en DJF

 

- Achats de fournitures de mercerie

- Electricité

- Loyer

- Charges de personnel

- Patente (annuelle)

 

 

80 000 - 100 000

20 000 - 40 000

35 000 - 70 000

60 000 - 100 000

79 000 - 90 000

 

La rentabilité de l'exploitation d'un atelier de tailleur ordinaire apparaît comme assez faible, avec un bénéfice de l'ordre de 70 000 à 100 000 DJF par mois.

  

V. REGLEMENTATION

La patente exigée pour exercer le métier de tailleur est ainsi calculée : un droit fixe de 25 000 DJF et un droit proportionnel de 20 % de la valeur locative de l'atelier. Il faut ajouter un taxe de 5 000 DJF par machine à coudre utilisée.

 

D'autre part, les tailleurs étrangers (la grande majorité) doivent payer la carte de séjour, qui varie entre 15 000 et 20 000 DJF.

 

VI. LE MILIEU PROFESSIONNEL

A) Organismes professionnels

 

Il n'y a pas de syndicat professionnel des tailleurs. Pourtant, ceux-ci connaissent tous des problèmes, par exemple le cas où le client ne revient pas chercher le vêtement qu'il a commandé, ou encore le cas où le client insatisfait veut être dédommagé. Devant ces problèmes de responsabilité, des usages et des positions communes pourraient être adoptés.

 

On peut aussi regretter qu'il n'existe pas d'organisation qui pourrait promouvoir une mode locale, le savoir faire et la créativité des tailleurs.

 B) Formation

La plupart des tailleurs ont appris leur métier sur le tas, parfois comme apprenti. Le tailleur de l'An 2000, rue Brazzaville, a fait des études dans une école, à "Technologic school of Ethiopia" et le tailleur Mahad a suivi un stage de formation en France.

Le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) avait organisé une formation au métier de la couture pour aider les réfugiés en 1984. Le tailleur Gamal (rue Soleillet) y a fait huit mois d'apprentissage. Malheureusement cette institution n'existe plus.

 

A Djibouti, il n'y a actuellement que trois organismes qui offrent une formation professionnelle en couture, et seulement pour un public féminin :

 

·      Le Foyer social :

Cette école est située en face du collège de Boulaos (tél : 35.05.39). Elle comprend un cycle d'enseignement général primaire et un cycle de formation professionnelle d'éducation ménagère dont la broderie et la couture, soit au total 221 élèves, toutes très jeunes. La formation dure 4 ans, les frais de scolarité sont modiques (600 à 700 DJF par mois). La production des élèves en broderie et en couture sont l'objet d'une exposition-vente deux fois par an : fin Avril et à l'occasion de l'Aïd.

 

·      L'Ecole Boulaos :

Cette institution privée s'adresse au même type d'élèves que le Foyer social : uniquement des jeunes filles, scolarisées ou ayant échoué à l'examen d'entrée en sixième, soit environ 200 élèves. Les tarifs sont similaires. L'école possède 4 ateliers bien équipés en machines Pfaff et Singer. La formation est de 3 à 4 ans pour la couture (la broderie ne fait l'objet que d'une initiation) et est sanctionnée par l'obtention d'un diplôme. Contact : Mme Nagat Daoud - tél : 35.04.88.

 

·      L'UNFD :

L'Union Nationale des Femmes Djiboutiennes est une association qui possède une école ménagère avec une section couture - broderie, destinée à toute femme djiboutienne, quel que soit son âge. Les locaux sont situés route de Balbaba, près du nouveau marché (tél : 35.04.21, directrice : Mme Safia Youssouf). L'inscription se fait le 15 Septembre, comme pour les écoles ; frais de dossier : 2000 DJF / an, écolages mensuels : 1 000 DJF. Le nombre de places est limité : une trentaine de personnes seulement.

 

Indiquons enfin qu'il existe en France un CAP de couture floue et de tailleur homme et dame, un BEP fabrication de vêtements sur mesure et même un bac pro Artisanat métiers d'art, option Vêtement.

 

C) Bibliographie

 - Fiche CIDJ n° 2271 Métiers de la couture, n°272 Métiers de la mode, 101 quai Branly - 75740 Paris cedex 15 tél : 01.44.49.12.00.

- Tailleur-Couturière, Observatoire des qualifications et des formations de l'artisanat, 12, avenue Marceau - 75008 Paris tél 01.44.43.10.00.

 

CONCLUSION

·      Beaucoup de tailleurs manquent peut-être de sens commercial, et pourraient améliorer leur chiffre d'affaires :

- en sortant de la routine et en étant plus à l'écoute de la mode,

- en produisant sur stocks certains produits demandés et concurrentiels par rapport au prêt à porter,

- en agençant mieux leur magasin, leur devanture, de façon plus attrayante pour la clientèle plus jeune,

- en démarchant et en négociant des contrats avec des administrations, des entreprises ou autres organismes.

 

·      La proximité de la clientèle reste un facteur de succès important. Le choix de l'implantation de l'atelier doit tenir compte de la répartition géographique des ateliers existants. Des quartiers, comme Engueilla, Gebal, Quartier 3, quartier 5, Cité du stade..., n'ont pas de tailleur installé. Dans les autres zones, les tailleurs se sont concentrés au bord des grands axes de circulation (rue de khât, avenue Nasser), ce qui laisse de vastes espaces sans concurrence, si ce n'est celle des tailleurs à domicile et des tailleurs de rue qui occupent le terrain.

 

·      L'expérience a montré en Europe que face à la montée du prêt à porter, tous les petits tailleurs et couturières ont disparu, sauf ceux et celles qui ont su s'engager

- dans un travail de plus haute qualité (tailleur de costumes, haute couture) et qui suppose un bon niveau de créativité et de technicité ;

- dans une spécialité : ouvrages traditionnels, tapisserie, broderie... où la concurrence du prêt à porter ne peut pas jouer.

Ces tendances commencent à se faire sentir à Djibouti.

 

 Cette étude a été financée par le

Programme des Nations Unies pour le Développement

(PNUD) à Djibouti